11 BAHA’IS SOUMIS À UNE DISPARITION FORCÉE DEPUIS PLUS DE 100 JOUR

CONTEXTE
Le 25 mai, des membres armés des forces houthies ont fait irruption lors d’un rassemblement pacifique de la communauté baha’ie à Sanaa, la capitale du Yémen. Ils ont arrêté et soumis à une disparition forcée 17 personnes, dont cinq femmes, des défenseur·e·s des droits humains et des employé·e·s humanitaires. Grâce aux pressions internationales, six de ces personnes ont depuis été libérées : un homme et trois femmes en juin, et deux hommes en juillet. Cependant, 11 personnes, neuf hommes et deux femmes, sont toujours détenues par les Houthis, et l’on ignore où elles se trouvent. Elles risquent de subir d’autres violations aux mains des Houthis, notamment des actes de torture et des mauvais traitements, voire d’être tuées. Elles doivent être libérées immédiatement et sans condition.
Amnistie Internationale a réuni depuis 2015 des informations sur la situation de 82 membres de la communauté baha’ie du Yémen qui ont été soumis à une disparition forcée, torturés, détenus au secret et privés du droit à un procès équitable après avoir été arrêtés par les autorités houthies de facto.
Cinq Baha’is arrêtés en 2016 ont été détenus pendant plus de deux ans sans inculpation ni procès et sans aucun moyen de contester leur placement en détention, avant d’être finalement inculpés en septembre 2018 de diverses infractions graves, notamment d’espionnage pour le compte d’États étrangers, dont certaines sont passibles de la peine de mort. Ils ont été jugés dans le cadre d’un procès collectif incluant 24 membres de la communauté baha’ie au total – les 19 autres, dont la fille adolescente d’un détenu baha’i, ont été inculpés par contumace. En 2020, les autorités houthies de facto ont ordonné la libération de tous les prisonniers baha’is à condition qu’ils quittent le pays. Cependant, les charges retenues contre les 24 Baha’is n’ont pas été abandonnées.
Un prisonnier d’opinion baha’i, Hamid Haydara, a été libéré en 2020 après avoir été gracié. Arrêté en 2013, il avait été condamné à mort en 2018. Amnistie Internationale avait fait part aux autorités houthies de facto de ses préoccupations concernant les motifs de sa détention et la procédure judiciaire entachée de graves irrégularités dans son cas, notamment avec une détention provisoire prolongée, des retards injustifiés concernant son procès, des allégations d’actes de torture et d’autres mauvais traitements, et le fait qu’il n’avait pas bénéficié des services d’un avocat pendant ses interrogatoires.
Toutes les parties au conflit armé qui se déroule au Yémen, y compris les forces houthies, le gouvernement reconnu par la communauté internationale, le Conseil de transition du Sud, la coalition dirigée par l’Arabie saoudite ainsi que les forces yéménites soutenues par les Émirats arabes unis, se sont livrées à des crimes de droit international et des violations des droits humains – homicides volontaires, détentions arbitraires, disparitions forcées, actes de torture et autres mauvais traitements, et procès iniques notamment.
LETTRE À ENVOYER
Monsieur,
J’ai appris avec inquiétude que 11 Baha’is – neuf hommes et deux femmes – sont toujours soumis à une disparition forcée par les autorités houthies de facto depuis la descente qui a eu lieu lors d’un rassemblement pacifique le 25 mai 2023. Il s’agit d’une nouvelle violation flagrante du droit international relatif aux droits humains qui s’inscrit dans les mesures de persécution prises par les autorités houthies de facto contre les Baha’is – une minorité religieuse au Yémen – et qui porte atteinte à leur droit à la liberté de religion et de conviction.
Les autorités houthies de facto ont arrêté 17 Baha’is lors de cette descente. Quelques jours après leur arrestation, le procureur général a rejeté une demande de libération déposée par leur avocat. Selon cet avocat, les autorités n’ont donné aucune information quant au lieu où ils sont détenus, et aucun avocat n’a pu communiquer avec eux. Je vous félicite du fait que six de ces personnes aient depuis été libérées, et vous prie instamment de libérer immédiatement et sans condition les 11 autres toujours maintenues en détention.
Parmi ces 11 personnes figure Abdullah Al Olofi, père de quatre enfants et défenseur des droits humains qui dirige des programmes de formation militante sur la coexistence pacifique et la liberté de religion et de conviction, ainsi que sur l’amélioration de la qualité du travail humanitaire lors des plans de réaction aux catastrophes. Hassan Tariq Thabet, père d’un bambin de deux ans, est un travailleur humanitaire qui a collaboré à la distribution alimentaire dans le cadre d'un projet du ministère de l’Éducation et a défendu la cause de l’éducation des enfants et de l’autonomisation des jeunes. Abdulelah Muhammad Al Boni, père de deux enfants et sur le point d'en avoir un troisième, est très impliqué dans les œuvres caritatives et les services à la communauté et a lancé des projets visant à favoriser l'harmonie au sein de la communauté.
Je crains que tous les Baha’is maintenus en détention ne risquent de subir d’autres atteintes aux droits humains, notamment des actes de torture et des mauvais traitements, des « aveux » forcés et des procès iniques pour des accusations fallacieuses et forgées de toutes pièces qui pourraient leur valoir une condamnation à mort. Amnistie Internationale a réuni des informations sur toutes ces violations commises par les autorités houthies de facto contre leurs opposant·e·s présumés, notamment les membres de la communauté baha’ie. Depuis ces arrestations, les autorités houthies ont tenu des propos incitant à la violence et à la discrimination envers cette minorité religieuse, propos qui font courir à d’autres personnes le risque d’être victimes de graves violations des droits humains.
J’appelle les autorités houthies de facto à révéler de toute urgence ce qu’il est advenu des 11 Baha’is détenus ainsi que le lieu où ils se trouvent, et à les libérer immédiatement et sans condition. Je vous demande également de mettre un terme à toutes les formes de discrimination et de persécution visant la minorité baha’ie et toutes les personnes prises pour cible uniquement parce qu’elles exercent pacifiquement leur droit à la liberté de religion et de conviction.
Veuillez agréer, Monsieur, l’expression de ma haute considération.
APPELS À
Porte-parole des autorités houthies de facto
Mohamed Abdelsalam Courriel : mdabdalsalam@gmail.com
Twitter : @abdusalamsalah
COPIES À
Mélanie Joly
Ministre des Affaires étrangères
111, rue Wellington
Ottawa (Ontario) K1A 0A6
Aucun timbre requis
Courriel: melanie.joly@parl.gc.ca
Son Excellence M. Jamal Abdullah Yahya AL-SALLAL
Ambassadeur
Ambassade de la République du Yémen
54 Chamberlain Avenue
Ottawa, ON K1S 1V9
Canada
Tel: (613) 729-6627 Fax: (613) 729-8915
Email: yeminfo@yemenembassy.ca
Mme Nadia Abdallah Ali AL-DABBI