• Tunisie

UNE FIGURE DE L’OPPOSITION DÉTENUE ARBITRAIREMENT

CONTEXTE

 

Le 3 octobre 2023, quelques jours après avoir exprimé son intérêt pour une candidature à la prochaine élection présidentielle, les forces de sécurité ont arrêté Abir Moussi, figure de l’opposition. Elle avait tenté de soumettre un recours contre les décrets présidentiels relatifs aux prochaines élections locales en invoquant un manque de transparence dans le processus électoral. Les forces de sécurité ont arrêté Abir Moussi et l’ont emmenée dans un lieu tenu secret. Le 5 octobre, elle a été interrogée par un juge d’instruction au sujet d’une série d’allégations liées à la sécurité et le juge a ordonné son placement en détention provisoire. Les autorités tunisiennes doivent libérer immédiatement Abir Moussi et abandonner les charges qui pèsent contre elle, car elles sont uniquement fondées sur l’exercice pacifique de ses droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion.

L’avocate Abir Moussi, 48 ans, est la présidente du Parti destourien libre (PDL) et une figure de proue de l’opposition au président Kaïs Saïed. Elle fut membre du Parlement de 2019 à 2021. D’après ses avocats, la santé d’Abir Moussi se dégrade en détention et risque de continuer de s’aggraver depuis qu’elle a entamé sa grève de la faim le 28 novembre.

Le 5 octobre, Abir Moussi a été interrogée par un juge d’instruction au tribunal de première instance de Tunis pour des accusations de « tentative de changement de la forme du gouvernement », « incitation à la violence sur le territoire tunisien » et « agression dans le but de provoquer le désordre » en vertu de l’article 72 du Code pénal, ainsi que de « traitement de données personnelles sans le consentement de la personne concernée » et d’« interférence avec la liberté de travail » en vertu des articles 27 et 87 de la loi sur la protection des données. Elle encourt désormais la peine de mort en vertu de l’article 72 du Code pénal, pour avoir exercé de manière pacifique ses droits aux libertés d’expression, de réunion et d’association.

Le 25 juillet 2021, le président Kaïs Saïed s’est octroyé des pouvoirs d’exception prévus selon lui par la Constitution tunisienne de 2014. Depuis février 2023, la situation des droits humains en Tunisie se dégrade rapidement tandis que plusieurs figures de l’opposition sont prises pour cibles. Depuis, les autorités ont ouvert des enquêtes pénales contre au moins 74 figures de l’opposition et d’autres personnes considérées comme des ennemis du président, notamment 44 personnes accusées d’infractions liées à l’exercice pacifique de leurs droits fondamentaux. Cette répression contre l’opposition menace les droits humains, notamment les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique en Tunisie, garantis par les articles 19, 21 et 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), et par les articles 9, 10 et 11 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, auxquels la Tunisie est partie.

LETTRE À ENVOYER

Monsieur le Président,

Je vous demande de libérer immédiatement la figure de l’opposition Abir Moussi et d’abandonner toutes les charges retenues contre elle. Abir Moussi fait l’objet d’investigations pour toute une série d’infractions en vertu du Code pénal et de la loi relative à la protection des données. Elle est incarcérée à la prison pour femmes de Manouba.

Le 24 septembre 2023, Abir Moussi a publié un communiqué de presse exprimant son intention de participer à la prochaine élection présidentielle. Quelques jours plus tard, le 3 octobre, des policiers l’ont arrêtée devant un bureau de l’administration publique annexé au Palais présidentiel alors qu’elle tentait de déposer un recours contre les décrets présidentiels auprès de l’administration concernée ; elle en a été empêchée. Abir Moussi a protesté contre ce refus arbitraire, elle est restée devant le bâtiment de l’administration et a fait une diffusion en live sur Facebook.

Selon des témoins et ses avocats, les forces de sécurité l’ont interpellée et emmenée dans un lieu tenu secret pendant près de deux heures avant que ses représentants légaux ne la localisent dans un poste de police à La Goulette, un quartier de la capitale Tunis. Ses avocats ont déclaré à Amnistie Internationale qu’elle a subi des blessures physiques, la police ayant usé d’une force excessive lors de son arrestation. Ils ont ajouté qu’ils n’avaient pas été autorisés à voir leur cliente pendant l’interrogatoire de police, en violation flagrante de ses droits à une procédure régulière et n’avaient été informés que plus tard de la décision du ministère public de la maintenir en détention provisoire à l’issue de 48 heures de garde à vue. Selon ses avocats, lors de sa première nuit de garde à vue, les policiers ont ignoré ses demandes pour les médicaments qu’elle est censée prendre à une heure précise tous les jours, ce qui a entraîné des complications de santé qui l’ont conduite à l’hôpital quelques jours plus tard.

Le 5 octobre, Abir Moussi a été interrogée par un juge d’instruction au tribunal de première instance de Tunis pour des accusations de « tentative de changement de la forme du gouvernement », « incitation à la violence sur le territoire tunisien » et « agression dans le but de provoquer le désordre » en vertu de l’article 72 du Code pénal, une infraction passible de la peine de mort, ainsi que des accusations liées au « traitement de données personnelles sans le consentement de la personne concernée » et à « l’interférence avec la liberté de travail », en vertu des articles 27 et 87 de la loi sur la protection des données. Elle a été placée en détention après avoir protesté pacifiquement contre le refus de la laisser accéder à un bureau de l’administration publique annexé au Palais présidentiel le 3 octobre.

Abir Moussi encourt désormais la peine de mort pour avoir exercé son droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique. Le recours accru au droit pénal pour poursuivre les militant·e·s politiques de l’opposition en représailles de leurs engagements politiques pacifiques a un effet paralysant sur l’espace civique. Le 28 novembre, ses avocats ont annoncé qu’elle avait entamé une grève de la faim pour protester contre sa détention arbitraire.

Je vous demande de libérer immédiatement Abir Moussi et d’abandonner toutes les charges retenues contre elle, car elles découlent de son militantisme politique pacifique. Dans l’attente de sa libération, elle doit être autorisée à voir régulièrement sa famille et ses avocats, à recevoir toute assistance médicale nécessaire, et doit être détenue dans des conditions conformes aux normes internationales relatives au traitement des prisonniers.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma haute considération.

APPELS À

Président de la République, Kaïs Saïed
Route de la Goulette Site archéologique de Carthage, Tunisie
Courriel : contact@carthage.tn
Twitter : @TnPresidency

COPIES À

Mélanie Joly
Ministre des Affaires étrangères
111, rue Wellington
Ottawa (Ontario) K1A 0A6
Aucun timbre requis
Courriel:  melanie.joly@parl.gc.ca 

M. Maher TRIMECHE
Conseiller et Chargé d'affaires, a.i.
Ambassade de la République tunisienne
515 O'Connor Street
Ottawa, ON K1S 3P8
Canada
Tel: (613) 237-0330, -0332 Fax: (613) 237-7939
Email: at.ottawa@diplomatie.gov.tn
Mme Nacira AYED EP TRIMECHE