IL FAUT ABROGER LA LOI DE 2023 PORTANT RÉPRESSION DE L’HOMOSEXUALITÉ ET GARANTIR L’OBLIGATION DE RENDRE DES COMPTES

CONTEXTE
Le 26 mai, le président ougandais a approuvé le projet de loi de 2023 portant répression de l’homosexualité. Cette loi criminalise les relations sexuelles entre adultes consentants de même sexe et prévoit toujours la peine de mort dans les cas d’« homosexualité aggravée ». Depuis qu’elle a été adoptée, on note une augmentation des cas de violence et de violations des droits humains visant les personnes LGBTI en Ouganda. Le gouvernement doit abroger la Loi de 2023 portant répression de l’homosexualité, mais également garantir le respect de l’obligation de rendre des comptes pour les attaques visant la communauté LGBTI.
La Loi de 2023 portant répression de l’homosexualité n’est pas la première tentative du gouvernement ougandais de criminaliser l’homosexualité. Depuis l’annulation de la loi interdisant l’homosexualité en 2014, de multiples efforts avaient été faits pour l’interdire, notamment avec l’adoption en 2021 de la Loi relative aux infractions à caractère sexuel, qui criminalisait tout « acte sexuel entre personnes de même genre » ainsi que les rapports anaux entre personnes de tout genre, passibles de peines pouvant aller jusqu’à 10 ans d’emprisonnement. La Loi de 2023 portant répression de l’homosexualité compte parmi les textes de loi les plus extrêmes au monde, car elle alourdit les peines et semble être la première à rendre hors la loi toute personne s'identifiant comme LGBTI.
Depuis son adoption au mois de mai, on constate une recrudescence de la haine, de la discrimination et de la violence contre les individus en raison de leur orientation sexuelle ou identité de genre.
Le Forum de sensibilisation et de promotion des droits humains (HRAPF), basé en Ouganda, a recensé au total 149 cas en juin et juillet 20231. Ces cas englobent des affaires liées à la sexualité2, des expulsions hors du domicile, du village ou d’un logement loué, ainsi que des agressions ou des menaces de violence. À ce jour, au moins cinq personnes ont été inculpées de différentes infractions au titre de la loi. Deux sur les cinq ont été inculpées en août d’« homosexualité aggravée », infraction passible de la peine de mort.
La Loi portant répression de l’homosexualité constitue une violation des obligations de l’Ouganda au titre du droit national et international, notamment le Chapitre 4 de la Constitution ougandaise, qui affirme le droit à l’égalité et à la non-discrimination, à la protection de la liberté personnelle, à la protection contre les traitements cruels ou dégradants et à la vie privée. Elle est également contraire aux dispositions de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, qui interdit la discrimination, les traitements cruels ou dégradants et les arrestations arbitraires. Ce texte constitue aussi une violation de plusieurs dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP). La DUDH protège le droit de s’exprimer librement et le droit à l’égalité et à la non-discrimination. Tout comme la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, la DUDH interdit la torture et les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, les arrestations et détentions arbitraires, ou l’exil, ainsi que les ingérences arbitraires dans la vie privée d’une personne, sa famille, son domicile ou sa correspondance. Le PIDCP contient des dispositions similaires dans ses articles 2, 7, 9 et 17.
LETTRE À ENVOYER
Monsieur le Président,
Je vous écris pour vous faire part de ma vive préoccupation au sujet de la Loi de 2023 portant répression de l’homosexualité, qui entérine la criminalisation des relations sexuelles entre adultes consentants de même sexe en Ouganda et constitue une violation de nombreux droits humains des personnes LGBTI et de celles et ceux qui défendent ces droits dans votre pays, notamment le droit à la dignité, à l’égalité devant la loi, à une égale protection de la loi, à la non-discrimination, et aux libertés d’expression et d’association.
Le fait que le président ait approuvé cette loi le 26 mai a un impact dévastateur sur les personnes LGBTI en Ouganda, déjà en butte à la persécution et à la discrimination. Elle alimente les violences et les discriminations à leur encontre et renforce les préjugés et les stéréotypes liés à l’homosexualité. Elle a aussi un effet paralysant sur la liberté d’expression et d’association, car ceux qui soutiennent les droits des personnes LGBTI risquent également la persécution et l’emprisonnement.
Par ailleurs, la loi aggrave le climat de peur au sein de la communauté LGBTI, qui assure que cela encourage les agressions de la part de certains membres de la population, des autorités policières, des autorités locales et des tribunaux à l'encontre d'individus sur la base de leur orientation sexuelle et de leur identité de genre réelles ou présumées. On a relevé une hausse du nombre de cas, comme celui de deux hommes inculpés le 18 août 2023 d’« homosexualité aggravée », une infraction qui emporte la peine de mort au titre de la loi.
Je vous appelle, ainsi que le Parlement ougandais, à abroger immédiatement la Loi de 2023 portant répression de l’homosexualité et à prendre des mesures pour protéger les droits fondamentaux de tous, indépendamment de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre. Je vous prie également de mener une enquête rapide et impartiale, en vue d’engager des poursuites pour toutes les attaques motivées par la haine qui visent les personnes et organisations LGBTI. Enfin, je prie les autorités ougandaises de cesser d’engager des poursuites contre des personnes en raison de leur orientation sexuelle ou identité de genre réelle ou présumée.
Veuillez agréer, Monsieur, l’expression de ma haute considération.
APPELS À
Président Yoweri Museveni
Parliament Avenue
Kampala, Ouganda Courriel : info@statehouse.go.ug
Twitter : @kagutamuseveni
COPIES À
Mélanie Joly
Ministre des Affaires étrangères
111, rue Wellington
Ottawa (Ontario) K1A 0A6
Aucun timbre requis
Courriel: melanie.joly@parl.gc.ca
Parlement d’Ouganda
Courriel : cpa@parliament.go.ug