UN AVOCAT SPÉCIALISTE DES DROITS HUMAINS DOIT ÊTRE LIBÉRÉ

CONTEXTE
Depuis son arrestation le 10 septembre 2017, les autorités égyptiennes maintiennent en détention arbitraire Ibrahim Metwaly, avocat spécialisé dans la défense des droits humains et cofondateur du groupe Familles de disparus en Egypte, qui a été arrêté alors qu’il se rendait à Genève pour s’adresser à l’ONU. Ibrahim Metwaly est incarcéré au sein du complexe pénitentiaire de Badr dans des conditions qui bafouent l’interdiction absolue de la torture et des autres formes de mauvais traitements. Il faut le libérer immédiatement et sans condition, car il est détenu uniquement pour avoir exercé ses droits fondamentaux de manière pacifique, notamment en cherchant à obtenir la vérité et la justice pour son fils, soumis à une disparition forcée.
Ibrahim Metwaly est avocat et cofondateur de Familles de disparus en Égypte. Il a cofondé cette organisation après la disparition forcée de son fils Amr, survenue le 8 juillet 2013. Il s’est adressé à des postes de police, des prisons, des hôpitaux et des morgues pour trouver son fils, sans succès. Les forces de sécurité égyptiennes ont nié avoir connaissance du lieu où il se trouvait. Amr est toujours victime de disparition forcée, mais sa famille a cessé de le rechercher après l’arrestation d’Ibrahim Metwally, par crainte de nouvelles représailles. Le 12 septembre 2017, après son arrestation, le service du procureur général de la sûreté de l’État a ordonné le placement en détention de cet avocat spécialiste des droits humains pour 15 jours, dans l’attente d’une enquête pour « création et direction d’une organisation illégale » (Familles de disparus en Égypte), « complot avec des instances étrangères en vue de porter atteinte à la sécurité nationale égyptienne » et « publication de fausses nouvelles ».
Si la loi égyptienne prévoit une durée maximale de deux ans pour la détention provisoire, cette règle est régulièrement contournée dans les affaires impliquant des personnes critiquant l’État et des opposant·e·s politiques, au moyen d’une pratique connue sous le nom de « rotation ». Les procureurs généraux de la sûreté de l’État ont ouvert des enquêtes sur de nouvelles affaires concernant Ibrahim Metwaly, soit le cas n° 1470 de 2019 et le cas n° 786 de 2020. On craint que des procureurs n’ouvrent à nouveau des enquêtes sur de nouvelles accusations contre Ibrahim Metwaly en septembre 2023, lorsque la période de détention maximale de deux ans expirera dans la troisième procédure le visant. Cela implique que les procureurs généraux de la sûreté de l’État ouvrent de nouvelles enquêtes en rapport avec des charges forgées de toutes pièces, s’appuyant sur des accusations similaires, contre des personnes dont la libération est imminente, afin de tenter de prolonger leur maintien en détention le temps d’une enquête. Malgré le rétablissement du Comité des grâces présidentielles en avril 2022 et le lancement du Dialogue national en mai 2023, les autorités égyptiennes continuent à maintenir en détention arbitraire des détracteurs réels ou supposés uniquement parce qu’ils ont exercé leurs droits fondamentaux, à l'issue de procès manifestement iniques.
Ibrahim Metwaly est actuellement détenu à la prison de Badr 3, située à 70 kilomètres au nord-est du Caire, où, selon les recherches d’Amnistie Internatiionale, les prisonniers se plaignent de conditions épouvantables et punitives. Sa famille est autorisée à lui rendre visite tous les 45 jours ou tous les deux mois. Les visiteurs sont assis dans une cabine avec une cloison en verre, ce qui rend la communication difficile en raison du faible volume du téléphone. La famille est également autorisée à apporter de la nourriture, des vêtements et des articles médicaux tous les 30 jours. Certains de ces articles, généralement autorisés, sont occasionnellement interdits et la famille n’est pas en mesure de savoir exactement ce qui peut ou ne peut pas être amené pendant les visites. Amnistie Internationale a précédemment fait état des conditions cruelles et inhumaines qui prévalent dans cette prison. D’anciens détenus et des proches de détenus ont parlé d’un accès très limité aux produits de première nécessité tels que la nourriture en quantité suffisante, les vêtements et les livres. Les autorités refusent souvent que les détenus puissent entretenir des contacts réguliers avec leurs proches ou leurs avocats, et des audiences de renouvellement de la détention se déroulent régulièrement en ligne, ce qui empêche le détenu de parler au juge. Des lettres de prisonniers ayant été rendues publiques depuis février 2022, font état de privations délibérées de soins de santé, d’une exposition à un froid extrême, de vidéo-surveillance et de l’exposition à des lumières vives 24 heures sur 24. Les lettres mentionnent que certains détenus ont tenté de se suicider et que d’autres ont entamé une grève de la faim.
Amnistie Internationale a recensé un grand nombre de cas de disparitions forcées survenus en Égypte au cours de la décennie écoulée. L’Agence de sécurité nationale et d’autres forces de sécurité détiennent systématiquement au secret des personnes accusées d’être impliquées dans des actes de terrorisme ou des manifestations, et refusent d’informer leurs proches et leurs avocats de leur sort et du lieu où elles se trouvent, pour des périodes allant de quelques jours à 23 mois. L’Égypte n’a toujours pas signé la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.
LETTRE À ENVOYER
Monsieur le Procureur général,
Je vous écris afin de vous exprimer ma vive préoccupation quant à la détention arbitraire d’Ibrahim Metwaly, qui est incarcéré de manière injustifiée depuis le 10 septembre 2017. Ibrahim Metwaly, avocat spécialiste des droits humains et cofondateur de l’organisation Familles de disparus en Égypte, a été arrêté à l’aéroport international du Caire alors qu’il se rendait à Genève, où il avait été invité à rencontrer le Groupe de travail des Nations unies sur les disparitions forcées ou involontaires, afin d’aborder la question des disparitions forcées en Égypte. Après son arrestation, il a été détenu au secret pendant deux jours avant de comparaître devant le procureur de la sûreté de l’État au Caire. Pendant cette période, il a été soumis à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements. Il a dit à ses avocats que des membres de l’Agence de sécurité nationale l’ont déshabillé intégralement, l’ont soumis à des décharges électriques sur diverses parties du corps, l’ont aspergé d’eau et l’ont roué de coups. En juin 2022, après avoir passé cinq ans dans le complexe pénitentiaire de Tora, Ibrahim Metwaly a été transféré à la prison de Badr 3, où il se trouve toujours. D’après les recherches effectuées par Amnistie Internationale, les personnes détenues dans cette prison subissent souvent des conditions horribles et punitives, et n’ont pas accès à des soins de santé adéquats. Il souffre de douleurs chroniques au dos.
Ibrahim Metwaly se trouve en détention provisoire depuis 2017 et le début d’une enquête sur les charges de « création et direction d’une organisation illégale » (Familles de disparus en Égypte), « complot avec des instances étrangères en vue de porter atteinte à la sécurité nationale égyptienne » et « publication de fausses nouvelles ». Alors que la durée maximale prévue par la loi égyptienne pour la détention provisoire est de deux ans, les autorités ont refusé de libérer Ibrahim Metwaly, et le procureur de la sûreté de l’État a ouvert deux procédures contre lui pour des accusations similaires afin de le maintenir en détention provisoire prolongée.
Je vous prie de libérer Ibrahim Metwaly immédiatement et sans condition car il est détenu uniquement pour avoir exercé pacifiquement ses droits humains. Dans l’attente de sa libération, il doit être protégé contre la torture et les autres mauvais traitements, et être autorisé à s’entretenir avec sa famille et ses avocats.
Veuillez agréer, Monsieur le Procureur, l’expression de ma haute considération.
APPELS À
Procureur général, Hamada al-Sawi
Office of the Public Prosecutor
Madinat al Rehab
Cairo, Égypte
Fax : +202 2577 4716
Twitter : @EgyptianPPO
COPIES À
Mélanie Joly
Ministre des Affaires étrangères
111, rue Wellington
Ottawa (Ontario) K1A 0A6
Aucun timbre requis
Courriel: melanie.joly@parl.gc.ca
Son Excellence M. Ahmed Abdallah Ibrahim HAFEZ
Ambassade de la République arabe d'Égypte
454 Laurier Avenue East
Ottawa, ON K1N 6R3
Canada
Tel: (613) 234-4931, 4935 Fax: (613) 234-9347/234-4398
Courriel: egyptianembassyottawa@gmail.com