Le Canada viole le droit à l’asile !
Le samedi 25 mars 2023, au cours de la visite du président américain, le gouvernement du Canada a annoncé un accord élargissant l’Entente sur les tiers pays sûrs à l’ensemble de la frontière canado-américaine. Conséquence directe : le chemin Roxham, par lequel des milliers de personnes passaient pour chercher la protection au Canada, a été officiellement fermé.
La décision inhumaine du 25 mars :
Depuis le 25 mars à minuit, toute personne migrante, à part quelques exceptions bien précises, interceptée le long de la frontière canado-américaine est refoulée aux Etats-Unis. Une fois sur le territoire des États-Unis, ces personnes risquent vraisemblablement d’être détenues arbitrairement et renvoyées vers leur pays d’origine. L’Entente sur les tiers pays sûrs représentait déjà un symbole du refus du Canada d'assumer ses responsabilités à l'égard des personnes demandeuses d'asile et elle était responsable de certains drames humains. En janvier dernier, cinq personnes, y compris un bébé, sont mortes gelées en essayant de franchir la frontière qui sépare le Canada et les États-Unis. En février, un homme mexicain est également décédé en essayant d'atteindre les États-Unis. Ces histoires tragiques ne sont malheureusement que les cas les plus récents.
La décision du Canada d’élargir cette entente est une sentence de mort pour d’autres personnes en quête de sécurité.
Militariser les frontières et criminaliser la migration ne réduisent pas l'espoir des personnes migrantes de trouver une vie meilleure ailleurs. Malheureusement, ces mesures ne font que rendre la migration plus périlleuse pour des personnes qui entreprennent des voyages longs et dangereux pour trouver la sécurité. Le refoulement des personnes demandeuses d’asile vers les États-Unis constitue une violation du droit fondamental à l’asile, des droits humains et des obligations internationales du Canada.
Exigeons du Premier ministre, du ministre de la Sécurité publique et du ministre de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté de respecter le droit de demander l’asile, d’annuler la décision irresponsable du 25 mars et de retirer le Canada de l’Entente sur les tiers pays sûrs !
Qu’est-ce que l’Entente SUR LES Tiers Pays Sûrs ?
Entrée en vigueur en 2004, l’Entente sur les tiers pays sûrs empêche les personnes arrivant aux points d’entrée terrestres du Canada de demander l’asile. Cette entente considère les deux pays comme des pays sûrs pour les personnes demandeuses d’asile. Par conséquent, toute personne demandeuse d’asile doit faire sa demande dans le premier des deux pays dans lequel elle est entrée. Si l’Entente sur les tiers pays sûrs n’était plus en vigueur, les personnes demandeuses d’asile pourraient se présenter à un point d’entrée officiel pour chercher la protection du Canada, au lieu de traverser irrégulièrement.
Depuis 2017, la constitutionalité de cette entente est contestée par Amnistie Internationale Canada, le Conseil Canadien pour les Réfugiés et le Conseil Canadien des Églises ainsi que par huit requérants individuels. En 2020, la Cour fédérale a rendu une décision invalidant l’entente et concluant que les dispositions la mettant en œuvre violaient la Charte canadienne des droits et libertés mais aussi les engagements internationaux du Canada en matière de protection des droits humains et particulièrement des droits des personnes réfugiées. Cette décision a ensuite été annulée pour des raisons techniques par la Cour d’appel fédérale mais la procédure est actuellement en cours devant la Cour Suprême du Canada pour décider de la constitutionnalité ou non de l’Entente. Dans ce contexte, la décision du Canada d’élargir l’Entente est encore plus choquante.
Pourquoi les Etats-Unis ne sont pas considérés comme un pays sûrs ?
L’Entente sur les tiers pays sûrs considère les États-Unis comme un « pays sûr ». Ce dernier est ainsi supposé respecter et protéger les droits humains tout en se conformant aux conventions internationales sur les réfugiés et celles contre la torture. Ceci étant dit, le traitement cruel et hostile des personnes demandeuses d’asile et de leurs demandes aux États-Unis prouve que les États-Unis ne sont pas un pays sûr. Aux Etats-Unis, de nombreux individus qui répondent à la définition internationale de réfugié sont privés de protection et refoulés (ou renvoyés de force) dans leur pays d’origine, où ils risquent d’être victimes de persécution et de torture, voire de mourir. Les individus renvoyés par le Canada aux États-Unis conformément à l’Entente sur les tiers pays sûrs courent un risque élevé d’être détenus arbitrairement, dans des conditions qui violent les normes internationales.
Par ailleurs, les États-Unis refusent l’asile aux femmes victimes de persécution fondée sur le genre. Elles se voient souvent privées de l’asile car la persécution fondée sur le genre n’est pas reconnue comme motif justifiant le statut de réfugié aux États-Unis.