• Chine

Un moine tibétain détenu au secret depuis deux ans

CONTEXTE

Rinchen Tsultrim, moine tibétain, a été condamné à quatre ans et six mois d’emprisonnement à l’issue d’un procès secret pour « incitation à la sécession » après avoir exprimé des opinions politiques sur son compte WeChat. Il est détenu au secret depuis le 1er août 2019 et ce n’est qu’en août 2021, via une réponse des autorités chinoises à des experts en droits humains des Nations unies, que sa famille a appris qu’il avait été jugé, quelle était la nature des faits qui lui étaient reprochés et où il se trouvait. En vertu du droit international relatif aux droits humains et des normes internationales en la matière, nul ne doit être emprisonné uniquement pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d'expression. Rinchen Tsultrim n’est pas autorisé à communiquer avec ses proches ni à consulter un avocat, ce qui suscite de sérieuses craintes quant à sa santé et son bien-être.

Rinchen Tsultrim, 29 ans, était moine au monastère de Nangshig, dans la préfecture autonome tibétaine d’Aba (province du Sichuan). Après une vague de troubles au Tibet en 2008, il a commencé à exprimer ses opinions sur WeChat et sur un site Internet personnel en tibétain appelé « Scepticisme à l’égard du Tibet ». En 2018, le bureau local de la Sécurité publique l’a mis en garde à deux reprises, lui ordonnant de ne plus exprimer d’opinions critiques en ligne sur la politique chinoise. Rinchen Tsultrim a été placé sous étroite surveillance et son site Internet a été fermé.

Rinchen Tsultrim a été arrêté le 1er août 2019. En mars 2020, sa famille a reçu des informations officielles indiquant qu’il était soupçonné d’« incitation au séparatisme ». En mars 2021, le Bureau de la sécurité publique de la préfecture autonome tibétaine et qiang d’Aba a informé ses proches qu’il se trouvait dans une prison à Chengdu, sans donner davantage de renseignements. Ce n’est que lorsque la réponse des autorités chinoises à une lettre adressée par quatre experts en droits humains des Nations unies a été rendue publique que sa famille a appris qu’il avait été jugé, quelle était la nature des faits qui lui étaient reprochés et où il était emprisonné. Dans les zones à population tibétaine et dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang, les minorités ethniques sont soumises à des restrictions et à des mesures de répression dures et généralisées, sous couvert de « lutte contre le séparatisme », « lutte contre l’extrémisme » ou « lutte contre le terrorisme ». L’accès aux régions à population tibétaine est toujours très restreint, en particulier pour les journalistes, les universitaires et les organisations de défense des droits humains, ce qui rend extrêmement difficile toute recherche et collecte d’informations sur la situation des droits humains sur place.

En juin 2020, 50 spécialistes indépendants des Nations unies en matière de droits humains ont formulé de vives critiques à l’égard de la Chine, entre autres pour la répression qu’elle exerce à l’encontre des minorités ethniques et religieuses au Xinjiang et au Tibet. Le 6 octobre 2020, 39 États membres de l’ONU ont publié une déclaration conjointe exprimant de profondes inquiétudes au sujet de la situation des droits humains au Tibet, au Xinjiang et dans d’autres régions. Le 21 juin 2021, 44 États membres de l’ONU ont publié une autre déclaration conjointe exprimant les mêmes préoccupations.

Selon des dispositions réglementaires entrées en vigueur le 1er février 2020, les groupes religieux doivent « suivre la direction du Parti communiste chinois [...], persister dans la voie de la sinisation de la religion et pratiquer les valeurs socialistes essentielles ». Les autorités s’emploient à aligner les pratiques et enseignements religieux sur l’idéologie d’État et à renforcer globalement leur contrôle sur tous les groupes religieux, aussi bien ceux approuvés par l’État que ceux qui ne sont pas enregistrés. Des informations ont fait état de la destruction de milliers de sites culturels ou religieux ces dernières années, en particulier dans le nord-ouest de la Chine. Les activités religieuses au Xinjiang et au Tibet sont toujours durement réprimées par le pouvoir central. Des personnes sont toujours la cible d’arrestations arbitraires pour des pratiques religieuses ordinaires.

LETTRE À ENVOYER

Monsieur le Directeur,

Je vous écris pour vous faire part de mon inquiétude au sujet de Rinchen Tsultrim (仁青持真), un moine tibétain qui, à l’issue d’un procès secret, a été condamné en novembre 2020 à quatre ans et six mois d'emprisonnement pour « incitation à la sécession ». Ce n’est qu’en août 2021, via une réponse des autorités chinoises à quatre experts en droits humains des Nations unies, que sa famille a appris qu’il avait été jugé, quelle était la nature des faits qui lui étaient reprochés et qu’il était détenu dans la prison d’Aba, dans la province du Sichuan.

J’ai appris avec consternation que Rinchen Tsultrim était incarcéré pour avoir exprimé des vues politiques sur son compte WeChat. En vertu du droit international relatif aux droits humains et des normes internationales en la matière, nul ne doit être emprisonné uniquement pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d'expression.

Il est extrêmement préoccupant que Rinchen Tsultrim soit détenu au secret depuis son arrestation, le 1er août 2019. À ce jour, aucune information sur sa situation n’a été donnée directement à sa famille par les autorités. Rinchen Tsultrim n’étant pas autorisé à avoir des contacts réguliers avec ses proches ni avec l’avocat de son choix, j’éprouve de vives préoccupations pour sa santé et son bien-être.

En conséquence, je vous prie instamment :

  • de libérer Rinchen Tsultrim sans délai, à moins qu’il n’existe des éléments crédibles, suffisants et recevables tendant à prouver qu’il a commis une infraction dument reconnue par le droit international et qu’il ne soit jugé dans le cadre d’un procès conforme aux normes internationales d’équité ;
  • de veiller à ce que Rinchen Tsultrim, en attendant sa libération, puisse avoir des contacts régulièrement et sans restriction avec sa famille et les avocats de son choix, et ne soit pas soumis à des actes de torture ni à d’autres mauvais traitements.

Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, l'expression de ma haute considération,

APPELS À

Directeur du Bureau de l’administration pénitentiaire de la province du Sichuan
Director Chen Zhilin
Sichuan Province Prison Administration Bureau
No. 1, Binjiangzhong Lu, Chengdu
610020 Sichuan Province
Chine

COPIES À


Son Excellence M. Peiwu CONG (m)
Ambassadeur
Ambassade de la République populaire de Chine
515 St. Patrick Street
Ottawa, ON K1N 5H3
Canada
Tel: (613) 789-3434,3513,8422/762-3769 (24h) Fax: (613) 789-1911
Email: chineseembassy.ca@gmail.com

 

Mélanie Joly
Ministre des Affaires étrangères
111, rue Wellington
Ottawa (Ontario) K1A 0A6
Aucun timbre requis
Courriel:  melanie.joly@parl.gc.ca